DISQUE ETCETERA RECORDS, KTC 1149, DISTRIBUTION
CODAEX
CONCERTO op. 17 (1985-87)
pour violoncelle et orchestre
(éditions DURAND)
Naissance (Con fantasia - Adagio) —
attacca : Métamorphose (Vivo) — attacca :
Libération (Lento) — attacca : Affirmation
(Adagio quasi variazioni)
Un événement décisif pour moi est lié
à la genèse de cette œuvre : il s'agit du choc éprouvé en entendant pour la
première fois Oration (Concerto elegiaco) pour violoncelle et orchestre,
du compositeur anglais Frank Bridge (1879-1941). J'ai ressenti alors une telle
émotion que j'ai voulu aussitôt en rendre compte musicalement. J'ai donc écrit
quelques mesures, en guise d'exutoire.
Quelques mois plus tard, remettant la
main presque par hasard sur ce fragment, je me suis dit qu'il fallait faire
quelque chose de ces lignes spontanément notées, qu'une œuvre s'y trouvait en
quelque sorte pressentie et je me mettais au travail.
Je pensais aussitôt écrire ce
Concerto à la mémoire de Frank Bridge tout en le dédiant à Henri Dutilleux dont
le Concerto pour violoncelle Tout un monde lointain est plus important
encore pour moi que celui de Bridge, en témoignage d'admiration à l'égard d'un
musicien qui m'a conseillé à plusieurs reprises sans toutefois que l'on puisse
dire qu'il fut vraiment mon professeur.
La composition de mon Concerto
pour violoncelle ne s'est pas à proprement parler étalée sur une période de
trois années (1985 à 1987) mais eut lieu en 1985 puis continuée et achevée en
1987. Or cette période fut cruciale pour mon développement puisqu'elle
représente une transition vers une plus grande simplicité expressive. Ainsi la
toute dernière partie du Concerto affirme une manière beaucoup plus mélodique,
beaucoup plus simple que le début de l'ouvrage — qui participe encore d'une
période antérieure plus polyphonique, jouant davantage sur les couleurs, les
superpositions kaléidoscopiques de musiques différentes rejoignant en cela les
préoccupations du compositeur américain Elliott Carter à qui j'ai dédié ma
Première Symphonie (1983-84).
Le Concerto pour violoncelle
n'est donc plus vraiment une œuvre de cette sorte et s'apparente plutôt à ma
Deuxième Symphonie (1986-90) qui lui emprunte d'ailleurs certains éléments
thématiques importants.
L'œuvre est construite comme un
parcours initiatique, où quelque chose de très net et bien dessiné s'affirme à
la fin après avoir tenté de se définir à plusieurs reprises au cours du morceau
: une métamorphose ou mieux, une naissance. Ainsi ce Concerto prend-il un sens
symbolique vis à vis de toute mon œuvre dans la mesure où il représente un
combat pour aller vers moi-même, vers la musique que je dois écrire.
Ce Concerto fut créé par Alain
Meunier et l'Orchestre National de Lille sous la direction de Yann-Pascal
Tortelier le 18 Juin 1990 au Palais des Congrès de Lille.
D'après les propos de N. Bacri recueillis par
Didier Henry
VOYAGE MUSICAL (Journal de l'Orchestre National de Lille), Juin 1990